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famille 1 famille 2
période de jeu : avril 2029
En ce début de printemps, les températures sont en hausse à Londres et les citoyens britanniques peuvent de nouveau profiter des parcs et autres activités en plein air. Veillez cependant à respecter les zones sorcières et les zones non-magiques, car la Milice Nationale rôde toujours !

Message approuvé par la Coalition
sous les projecteurs
La nouvelle saison de la Purge est désormais lancée, plus d'informations sur l'intrigue ici. Qui sont donc les heureux élus de l'émission vedette de la NGBC ? Enfin, un discord a été spécialement créé pour le forum, n'hésitez pas à nous rejoindre. On vous y attend nombreux !
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 words remain.

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Nedra Avedisian
Nedra Avedisian
ADMINISTRATRICE
DATE D'ARRIVEE : 08/04/2018
MESSAGES : 259
MONNAIE : 104
PSEUDO : raph
MULTICOMPTES : vasyl (dc)
AVATAR & CREDITS : james & alcuna licenza / signa astra, moderator.
words remain. Tumblr_od2zury5Sc1qcbx8ko8_250
ÂGE : (33 ans)
ASCENDANCE : (no-maj)
STATUT CIVIL : (mariée) à ben kaplan. tout sauf un rêve, encore moins le père de son gosse.
METIER : (ngbc) pôle communication.
PARTICULARITE : (trous de mémoire) suite à un sortilège d'amnésie temporaire raté.
CADENCE D'ÉCRITURE : variable (horaires décalés)

repello wizard

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MessageSujet: words remain.   words remain. EmptySam 4 Avr - 11:50

nedra avedisian
“ Lorem ipsum dolor sit amet, consectetur adipiscing elit, sed do eiusmod tempor incididunt ut labore et dolore magna aliqua. Lorem ipsum dolor sit amet, consectetur adipiscing elit, sed do eiusmod tempor incididunt.”

NOM : connu d’un public averti, Avedisian était autrefois une gageure de qualité pour quiconque avait un pied dans le monde du cinéma d’auteur et du théâtre. Un patronyme qu’elle a conservé au détriment de celui de l’époux pour une renommée qui s’étiole et se marbre de mépris depuis qu’on l’accole aux visages de la propagande pro-gouvernement et anti-réunification. L’admiration du public s’est perdue dans les exactions crasseuses de l’ex enfant-star. PRÉNOM : Nedra. D’un roman de Salter que sa mère affectionnait. NAISSANCE, NATIONALITÉ &  GE : la double nationalité anglo-américaine n’a plus de valeur aujourd’hui que celle que Nedra lui donne encore. Née à Los Angeles le 30 octobre 1995 (33 ans), elle a grandi avec un pied dans sa ville natale, et l’autre dans celle de sa mère, Londres. Les allers-retours ont cessé à l’âge de 17 ans, quand sa mère a repris la direction d’une compagnie théâtrale et si Nedra nourrissait l’espoir de poursuivre ses projets outre-Atlantique, ceux-ci sont morts dans l’oeuf peu après la fermeture des frontières. ASCENDANCE : ils se targuent aujourd’hui de la propreté de leur sang, dénué de magie, quand dix ans auparavant, rien de tout ça n’avait d’importance. D’autant que ce n’est plus vrai, quand bien même seule Nedra détient-elle la certitude que son fils, un jour, finira par manifester la magie de son père biologique. SCOLARITÉ : éclatée, pavée d’interruptions dès l’instant où Nedra a débuté sur les planches. De manière générale, des écoles privées où le fric glissé sous le bureau suffisait à combler les lacunes d’une gosse plus préoccupée par son succès sous le feu des projecteurs que par l’excellence scolaire. Nedra a commencé les cours de théâtre dès l’âge de 6 ans, puis a fait deux ans au Drama Center de l’Université des arts de Londres en parallèle de ses projets cinématographiques avant que tout ne se casse la gueule. OCCUPATION ACTUELLE : propagande menée par la NGBC tbc. STATUT MATRIMONIAL : son mariage avec Benjamin Kaplan est une union dont les intérêts, avant tout professionnels, finiront bientôt par être bouffés par la bulle de rancune qui enfle lentement entre eux. La naissance de son fils deux ans plus tôt a cristallisé des dissensions pré-existantes - parce qu’on ne peut accorder à Nedra le qualificatif de fidèle. Ses coucheries occasionnelles passaient encore tant qu’elle les tenait en laisse, et loin des photographes. Mais Vinnie n’est pas le fils de Kaplan et ça se voit. Un outrage qu’il peine à lui pardonner. L’enfant pâtit des conflits à répétition, livré à des nannies qui ne remplaceront jamais sa mère. Ce n’est pourtant pas faute d’essayer, mais Nedra est incapable de s’occuper de son fils. Chaque regard est un douloureux rappel de celui qu’elle a perdu dix ans auparavant - de ce qu’elle ne retrouvera probablement jamais. Tout ce qu’elle gardera sera cette culpabilité hurlante qui lui scie les os, que les anxiolytiques ou les potions n’auront jamais le pouvoir d’étouffer (elle l’a pourtant espéré). INVENTAIRE : une collection de robes de créateurs dont elle ne sait plus quoi faire et qu’elle n’a, pour la plupart, jamais portées - suffisamment de rouges à lèvres pour remplir deux tiroirs de sa commode - un Sig-Sauer dont Ben lui a appris à se servir parce qu’il ne faisait pas confiance aux dernières inventions no-maj destinées à se protéger de la magie, mais avec lequel elle n’est encore jamais sortie - un jeu de tarot corné - des post-its collés un peu partout, juste pour se rappeler qu’elle doit appeler le thérapeute mardi prochain, qu’elle a une réunion importante après le yoga, qu’elle a déplacé son carnet d’adresse dans la bibliothèque, que Sally s’est séparée le mois dernier (histoire d’éviter les gaffes embarrassantes) - un miroir de poche - des patchs de nicotine inutilisés - des clopes - une pensine de voyage offerte des années plus tôt - le bracelet de naissance de son fils planqué dans une boîte à bijoux, dont le prénom inscrit au stylo bille commence à s’effacer. ALLÉGEANCE : forcée par la peur et une psychose pesante à la suite de sa perte de mémoire, son allégeance s’est tournée vers les Héritiers de Salem de façon presque naturelle. Ce qui ne l’empêche pas de consulter des voyants sorciers, des médicomages de toutes spécialités confondues, d’avaler des filtres et des potions soi-disant miraculeuses qu’on lui délivre pour régler la montagne de problèmes que Nedra se traîne comme des casseroles. Une ambivalence dont elle a conscience et que l’on moque dans son dos, mais dont il lui est impossible de se défaire. PARTICULARITÉS : la mémoire grevée, trouée de galeries où règne un néant terrifiant. Des pans entiers de sa mémoire perdus au nom d’une ambition grotesque, dans la poursuite d’une carrière aux Etats-Unis vouée d’avance à l’échec dès l’instant où l’Angleterre a décidé de lever le voile. Si les premiers allers-retours se sont passés sans encombre, le dernier sortilège d’amnésie temporaire ne l’est, dix ans après, toujours pas. La mémoire à court terme s’est dégradée en même temps que sa confiance à l’égard du monde magique. AVATAR : Lily James.

choses à savoir : (30 sept 1995) Naissance à Los Angeles. Papa est américain et producteur, maman est anglaise et comédienne. Première enfant du couple, Nedra est une princesse à qui l’on destine un succès sans concessions. Des promesses de paillettes et de reconnaissance sur lesquelles elle comptera toujours, sans pleinement réaliser à quel point la chose était acquise avant que le tout disparaisse à l’aube de sa vingtaine. (avril 1992) Naissance de sa cadette, Dafne. (1995-2012) Vit entre les Etats-Unis et l’Angleterre. Nedra change souvent d’école, parvient sans mal à s’entourer d’amis où qu’elle se trouve et ne pâtit jamais de ces changements fréquents d’environnement ; au contraire, ils la ravissent. Elle n’excelle pas sur les bancs de l’école, se démarque toutefois dans ses cours de théâtre. (2005) Premier rôle dans une série télévisée grâce aux contacts de son père. Elle obtient son premier succès médiatique et, à dix ans à peine, Nedra se voit déjà comme une star, ce qu’aucun de ses parents n’oserait démentir. (été 2011) Stage avec la Youth Company de la Royal Academy of Dramatic Art de Londres. (2012) Sa mère se voit offrir le lead de la compagnie théâtrale dans laquelle a été comédienne pendant des années. C’est à Londres, et même si ça veut dire pour son père de faire une croix sur ses propres projets, la famille déménage en Angleterre de manière définitive. (sept. 2013 - juil. 2015) Fait deux ans au Drama Center de l’Université des Arts de Londres. Est engagée dans plusieurs projets sur grands écrans, dont deux aux USA, qu’elle parvient sans mal à entreprendre en dépit des allers-retours fréquents que ça lui demande. Nedra vit son conte de fée, ses rêves de petite fille, côtoie les stars et prend goût à ce train de vie somptueux. Ne s’en défera jamais. (fév. 2017) Début de relation avec Marchesi. Apprendre qu’il est un sorcier est loin de l’effrayer ; au contraire, fascinée par l’existence de ce monde dont elle ne se serait pas doutée en dehors de ses rêves les plus fous, elle embrasse sans hésitation cette ouverture qu’il lui offre sur le monde de la magie. (mai 2018) À Londres, la Levée du Voile réunit les sorciers aux non-magiques. La fermeture des frontières suit l’annonce peu de temps après et, si la mise en place du sortilège d’amnésie temporaire à de quoi l’inquiéter, Nedra n’abandonne pas pour autant ses projets Outre-Atlantique : les premiers voyages se passent sans encombre et l’amnésie devient une routine qui ne lui fait plus peur. (août 2018) C’est le voyage de trop. L’arrivée à New-York est catastrophique : Nedra se souvient à peine de son prénom, ne sait définitivement plus ce qu’elle vient faire aux Etats-Unis. Ses parents, informés de l’état de leur fille que là-bas, on ne comprend pas, la rapatrient à Londres en catastrophe. L’amnésie, supposée réversible, ne le sera pas complètement. Les consultations avec les spécialistes se succèdent les unes après les autres avant qu’on en vienne à la conclusion qu’il n’y a rien à faire pour tout ce que Nedra a perdu. (2019) Elle n’est pas la seule pour qui les sortilèges d’amnésie se révèlent dangereux. Dans Londres, des manifestations no-maj pour protester contre les dangers qu’impliquent cette “formalité” qui ne concerne pas les sorciers se multiplient et ses parents adhèrent à la réprobation générale. Nedra sent sa propre méfiance à l’égard de la magie grandir : elle échappe à toute règle et elle entraperçoit le danger qu’elle représente pour quiconque en est dépourvu. Les dérives sont infinies, c’est une science inexacte, dangereuse, et est-ce seulement une science, après tout ? (avr. 2020) Les efforts de Nedra pour maintenir sa relation à flot ne suffiront pas à combler le ravin qui se creuse entre elle et Cadell. Son amour ne suffit plus, et leur histoire tombe à l’eau. (2020-2021) Par le biais de ses parents, Nedra met un premier pied chez les puristes moldus, dont l’idéologie extrémiste maquillée de bienveillance finit par la séduire. La magie est un danger, et si certaines de leurs actions la saisiront d’effroi (à l’instar du meurtre de Lilia Zabini), elle fermera les yeux sur certaines choses dans l’idée terrible qu’ils agissent pour le plus grand bien. A leur contact, elle fait la connaissance de Benjamin Kaplan, jeune prodige du Département de la Surveillance Nationale. (mai 2022) Annonce de ses fiançailles avec Kaplan. L’union tombe sous le sens et ravit (presque) tout le monde. (été 2023) Mariage en grandes pompes. Les festivités durent trois jours, réunissent tout le gratin londonien, la plupart sont des no-maj. Figures publiques et politiques, leur couple fait régulièrement la une des journaux people. (2024) Au cours d’une réception officielle à laquelle Cadell et sa femme participent, elle est présentée par cette dernière à son époux. La pauvre ignore tout de leur passé. Revancharde, nostalgique et blessée par la confrontation, Nedra réprime une jalousie mordante à son égard et s’arrange pour prendre Cadell à parti. Les regrets ne sont pas loin, et il en faut peu pour qu’elle retombe dans les bras de Marchesi avec une ferveur honteuse. (sept. 2025) Le cap de la trentaine lui laisse un arrière goût amer. Une crise existentielle la prend à la gorge et elle était loin de s’y être préparée. Son couple bat de l’aile, l’affection qu’ils se portaient n’est plus qu’une vague tendresse qu’ils affichent aux yeux des photographes, et qui ne reflète en rien la morosité de leurs rapports. (avr. 2026) Nedra est enceinte. Si c’est une nouvelle que sa mère accueille avec ravissement, c’est une véritable catastrophe aux yeux de sa fille; inutile de se mentir, la paternité de l’enfant est plus que douteuse. La grossesse est vécue comme un calvaire après qu’on lui ait annoncé qu’il était trop tard pour y remédier (elle l’aurait fait, si elle avait pu). (oct. 2026) La naissance de Vinnie est un traumatisme dont elle ne se remettra jamais vraiment. La rencontre avec l’enfant ne se fait pas comme prévue, et à mesure que les différences entre Vinnie et Benjamin s’accentuent, la preuve de son infidélité qu’arbore son fils achève de briser son mariage. (jan. 2027) Hospitalisée trois mois en centre spécialisé suite à une psychose puerpérale. (2027) Participation active à l a préméditation des meurtres des dirigeants de l'Alliance. Malgré le malaise, Nedra masque ses doutes sous une épaisse couche de bonne volonté pour l'élaboration des messages diffusés dans la nuit.
pseudo : alhazen. âge : on devrait interdire cette question. pays : confinée dans mon jardin bis. présence : toujours al. que penses-tu du forum ? pépite mes enfants. bizutage accepté ? léssé moi tkl. scénario/pré-lien ou inventé : inventé crédits : alcuna licenza quelque chose à ajouter ? reboot n°1. code à remplir :
points validation : merci de vous référer à ce sujet.
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Nedra Avedisian
Nedra Avedisian
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MessageSujet: Re: words remain.   words remain. EmptySam 4 Avr - 11:51

words remain.“ - La prochaine fois que tu te maries, tu devrais choisir une femme comme celle-là.
- Que veux-tu dire ?
- Ne t'affole pas. Tu aimerais vivre comme ça, c'est clair.
- Ne dis pas de bêtises.
- D'ailleurs, je pense que tu devrais le faire.
- C'est une femme très généreuse, c'est tout.
- Généreuse ?
- Oui, dans le sens riche, abondante.
- C'est la femme la plus égoïste du monde.

i. the magician

(summer 2004 - los angeles) En contrebas, deux gamines blondes se tiraient les cheveux en hurlant, les ongles raclant la peau de l’autre en se disputant une console dernier cri. Leurs robes soleil à motifs colorés se fondaient dans le paysage chatoyant de fin de soirée. L’air demeurait étouffant malgré la tombée du jour et, sur le balcon de son appartement en front de mer (une pépite, on n’en trouvait plus des comme ça, et encore moins au prix où il l’avait acheté à son époque), le vieil homme épongea son front couvert de sueur. Comment pouvait-on transpirer autant à son âge ? « Get off me silly cow !Ouch ! MOM ! Dafne won’t give me my DS back ! Stopityoufucker !Well you shouldn’t have broke mine !Stop it, now. I said stop it ! Jesus gimme that. No more gameboy for anyone, confiscated. » Parce qu’il n’avait rien de mieux à faire et qu’en définitive, les meilleurs moments de sa journée se résumaient à glaner les bribes de conversations des badaux qui se promenaient sous sa fenêtre, il s’accouda à la rambarde et étudia la scène d’un regard critique. La mère parvint à récupérer la console en l’arrachant des mains de l’aînée, qui se remit à brailler de plus belle, tandis que la plus petite commençait à pleurer, ses petits pieds chaussés de tongs bleues à paillettes frappant le sol sous le coup d’une frustration difficilement contenue. Ses couettes blondes sautaient sur ses épaules tandis qu’elle martelait d’une voix suraiguë : « It’s not fair ! Not ! Fair ! » Il en voyait tous les jours, des gosses comme celles-là. De nos jours, l’autorité parentale paraissait n’être plus qu’un vague concept tout juste bon à jeter aux ordures. Avec toutes les conneries dont ils parlaient aujourd’hui sur l’éducation positive et il en passait des belles, les limites n’existaient plus et il lui semblait que bientôt, les gamins ne pourraient plus compter que sur eux-mêmes pour s’éduquer une fois que la vieille génération aurait disparu. Il repensa à sa propre marmaille, aux maigres bulletins de nouvelles qu’ils lui envoyaient de temps en temps avec des photos de ses petits enfants, qu’il n’avait pas vu depuis leurs naissances. Une vague de nostalgie secoua sa vieille carcasse alors que, en contrebas, les cris atteignaient leur paroxysme. Elles pleuraient toutes les deux, maintenant. La mère leva les yeux au ciel et s’aperçut de sa présence. Une légère rougeur lui monta aux joues : « Oh, I’m… So sorry for the trouble. They’re tired — girls, shut up for god’s sake. » Elle avait l’air épuisé. Le vieux eut un geste de la main, surpris par son accent typiquement anglais. « No worries. It was a terrible heat today. » La femme eut un sourire contrit en relevant du sol les deux morveuses, qui boudaient, suspendues aux bras de leur mère. Elle était belle. De ces beautés aériennes, insaisissables, dont les gamines hériteraient certainement une fois perdues les rondeurs enfantines. Il se demanda si elle était actrice — il n’y avait que ça, ici. Des acteurs et des pseudos comédiens, une belle bande de guignols qui se pavanaient dans les rues à longueur de journée et les salissaient bruyamment la nuit venue. Mais il émanait d’elle quelque chose d’impalpable et d’infiniment attirant et, s’il posait un jour les yeux sur elle à travers un écran de cinéma, sûr qu’il s’y arrêterait plus d’un instant.
La femme s’excusa de nouveau, poussant ses filles un peu plus loin en leur enjoignant une nouvelle fois de se taire et — ah, oui, voilà. Le patriarche, un gaillard aux larges épaules et au sourire flegmatique vint compléter le portrait de famille au pas de course. Une barbe de quelques jours adoucissait le visage taillé à la serpe, dont le regard sévère était rehaussé par la ligne droite et fournie de ses sourcils. « Allen, come one, we've been waiting for half an hour, what the hell were you doing ? They’re unsustainableI know, I’m sorry, I ran into Navarro and, well, you know how he can be... » La fin de la conversation, légèrement tendue, se perdit à mesure qu’ils s’éloignaient. Alors qu’ils s’apprêtaient à disparaître au croisement d’une rue, la femme se retourna et lui adressa un signe de la main. « Bye ! » Et les gamines, bien qu’elles n’aient aucune idée d’à qui elles disaient au revoir, se retournèrent à leur tour et secouèrent la main en scandant « Byyyyee ! » d’un ton enjôleur, toute trace de caprice évincée par la soudaine nécessité de se montrer charmantes.


ii. the star

(september 2014) Des mèches dorées mêlées sur le parquet de l’appartement. Deux têtes collées l’une à l’autre, baignant dans la lumière douce d’un jour sans fin. Les mains pâles, encore imprégnées des vestiges de l’enfance, s’élevaient vers le plafond, chargé de particules de poussière. « Oh, look at this one. » Un vieux rock langoureux résonnait en arrière plan. Nedra quitta des yeux son téléphone, regarda la photo que Dafne lui montrait ; un cliché au filtre ensoleillé d’elles deux, élégantes et diablement adultes dans leurs robes haute-couture. La photo avait été prise lors de la première d’une des dernières créations de Romy au Royal Albert Hall. « Not bad. And this one. » Le profil de Nedra comme auréolé d’une lumière sainte alors qu’elle se tient sur le London Bridge, rayonnante, épanouie. « Archer has commented : “london looks good on you”, heart-eyes. Looks like he’s not over you. » Elles se marrent. « Always thought he was a freaking dumbass. Not to say a perfect weirdo. Good-looking, but weird.Don’t say that. He was kind.Kind but stupid. Remember when he asked me how islands do not go adrift ? » Nedra éclata de rire. « Yeah. At least he didn’t asked me to go out with him while on drugs, and in front of dad... » La paume de Dafne s’écrasa sur son visage. « Shut up ! » Dafne se redressa, ramena sa crinière désordonnée dans son dos, l’air vaguement blessé. « I miss him, you know. He said he’d come, but I don’t think he will. » Deux ans après leur arrivée à Londres, et en dépit de tout ce que cette ville avait à leur offrir, l’effervescence teintée d’indolence de Los Angeles leur manquait toujours autant, bien plus que les amours laissées derrière elles. Seule l’aînée y trouvait son compte, changeant de petits copains comme on change de tenue, goûtant l’indépendance nouvelle, le succès de ses études (une première), la renommée débutante dont la cadette riait quotidiennement. Dafne cherchait sa voie. Avait repris les critiques acerbes de sa mère à l’égard des anglais, moquait leurs manières, leur bière dégueulasse, leurs soirées stupides.
Nedra tendit la main vers elle, ses ongles peints se mêlant aux mèches si semblables aux siennes, toute nimbée de silence.

(july 2018) Son sac à main s’écrasa bruyamment au sol au moment où elle faisait irruption dans la chambre plongée dans l’ombre. « Wake up, I’m home ! » Là où Nedra dormait habituellement s’amoncelait un mélange hétéroclite de plumes, papiers, bouquins et schémas représentant des cellules, des cycles chimiques complexes, annotés d’une écriture serrée - et illisible. Un sourire roublard lui barrait la joue quand elle balaya le tout d’une main impatiente, peu soucieuse de semer le désordre dans ce qu’elle voyait déjà comme un foutoir innommable. Les livres tombèrent dans un bruit sourd au pied du lit. Cadell remua légèrement quand elle se glissa sous les couvertures, vibrante d’une joie frénétique en dépit de la fatigue du voyage qui lui labourait les reins. Dix heures de vol, une heure et demi d’escale, deux trajets en taxis et d’innombrables heures d’attente plus tôt, Nedra hantait les rues de son enfance, l’ego boursouflé d’une satisfaction brûlante au sortir de ses castings -un succès, lui avait assuré Tilly. « There won’t be any call back this time. You smashed it sweetheart ! » lui avait-elle hurlé à l’autre bout du fil, aussi exubérante qu’à son habitude. « Guess who got the role... » Il protesta d’une voix ensommeillée lorsqu’elle imisca ses mains glacées sous son t-shirt, le nez pressé contre son cou. « Holy shit, your hands are fucking frozenI nailed it, Cade. I have two weeks until I have to go back to LA, and I had to fight for it, but I did it and it’s gonna be something, believe meWait, » il s’écarta légèrement, les marques de l’oreiller imprimées sur sa joue, qu’une barbe de quelques jours assombrissait; elle l’effleura du bout des doigts comme on caresse un vieux souvenir. « what do you mean, two weeks ?I know it’s short but I can’t cop out of this. Maybe you can come with me. » Le rire se propagea à son regard avant de résonner à son oreille. « How could I ? I don’t even have time to bake an egg these days.  — I don’t know, we’ll manage it. » We always do. « Tell me you’re happy. » Elle prit son silence pour un assentiment. Jacassa pendant quelques minutes encore au sujet de la série, du rôle, de l'incompétence du personnel de la compagnie aérienne. S'endormit aussi soudainement qu'une bougie que l'on mouche, pleine de la certitude que la vie l'attendait, brillante, dorée, infiniment désirable.
Elle oublierait cette plénitude.


iii. the hanged man / death

(august 2018) Propulsé vers l’avant dans un élan de colère qui n’eut pas besoin d’un hurlement pour se faire entendre, Allen écrasa son poing sur le bureau du médecin. Le toubib fit un bond sur sa chaise, le reste de ses explications étranglées sous l’effet de la surprise — et de la peur. En dépit de la bonhomie apparente d’Avedisian, il n’était pas homme à contrarier, en témoignait la dureté de son regard, et la houle qui l’agitait et que seule une veine saillante battant sur sa tempe trahissait jusqu’à maintenant. À sa droite, l’épouse, livide, ne cessait de jeter des regards aux alentours, s’attendant vraisemblablement à ce que quelqu’un surgisse en criant “poisson d’avril !”. « Qu’est-ce que c’est que ces conneries ? Vous ne pourriez pas parler anglais ? Laissez-tomber votre putain de jargon médical, Fletcher. » Il remonta les lunettes qui avaient glissé sur son nez. Quand il reprit, sa voix avait gagné un octave et son débit de parole s’intensifia dans sa hâte d’exposer au plus vite ce qui, en définitive, n’était toujours que des suppositions. « Bien sûr. J’étais en train de vous expliquer qu’il était impossible, pour l’heure, d’établir avec précision un diagnostic au sujet de votre fille. L’amnésie est un processus complexe, dont l’évolution est lente et difficile à anticiper. Quant aux certitudes, la seule que l’on ait à l’heure actuelle est qu’elle souffre -pour l’instant- d’une amnésie rétrograde : elle a oublié certaines choses survenues avant son départ pour Los Angeles et…Qu’est-ce que vous entendez pas “pour l’instant” ? » Fletcher lutta contre l’envie de se tasser sur son siège et de s’y fondre jusqu’à ne former plus qu’un avec le cuir. « Eh bien… Il se pourrait qu’elle développe également une amnésie à plus long terme qui l’empêcherait, par exemple, de mémoriser ou d’apprendre.Vous voulez dire qu’elle pourrait ne plus… jouer ? Mémoriser un texte ?Oh Seigneur. » Romy porta la main à son front. « Il est encore trop tôt pour le dire, je vais avoir besoin de lui faire passer quelques examens complémentaires et organiser un suivi régulier afin d’évaluer ce qu’elle a vraiment perdu. Rien ne nous dit que les choses n’iront pas vers un mieux, bien que dans certains cas de démence il a été décrit d-De démence ? Je vous demande pardon ? » Sous le bureau, le genou d’Avedisian se mit à sursauter frénétiquement sous l’assaut d’une panique latente tandis que sa femme se mettait à pleurer en silence, l’air défait. Fletcher sentit sa contenance se faire la malle à mesure que l'angoisse et la fureur prenaient forme et couleur sur les traits tendus de ses vis-à-vis. « Je veux dire… je… Les causes de son amnésie sonttout à fait déterminées, ces saloperies de sorciers lui ont atomisé la cervelle, il n’y a rien de plus à direoui, en… en effet, la magie est manifestement à l’origine de ses troubles, et je peux vous assurer que d’autres voyageurs sans-magie se sont retrouvés dans des états bien plus préoccupants que votre fille. Certains sont effectivement devenus… déments. » Un silence de mort accueillit sa déclaration. Il n’y eut rien de plus à ajouter, en effet; rien de plus que l’horreur qui se dessinait à digérer, au beau milieu de ces relents de colère sans aucune prise, aucune issue, qui leur sautèrent à la gorge et ne les quitterait jamais vraiment à compter de ce jour.
Ils savaient si peu de ce sortilège, leur dit-il.



iv. the lovers

(2021 - cricket club) « Tell me again what the fuck we’re doing here ? » Nerveuse, Dafné se rongeait les cuticules en jetant des regards furieux autour d’elle. On l’avait rarement vue aussi agacée par ce qui n’était rien de plus qu’un énième dîner au Cricket Club. Sa mère les y avait traînées un nombre incalculable de fois pendant leur adolescence, convaincue de l’importance pour elles de se fondre dans le cercle restreint et ô combien sélect de la noblesse anglaise dont elle était issue mais dont, elles, ses filles, n’avaient hérité que partiellement des manières. Elles avaient passé trop de temps à côtoyer ces imbéciles d’américains que Romy passait son temps à maudire, quand bien même en avait-elle épousé un et vécu à cheval entre Londres et Los Angeles pendant près de vingt ans. Il n’y avait qu’à voir le comportement de l’assistance au contact des Stoughton, qui écopaient d’une tolérance tout juste sincère de la part de leurs pairs, chez qui l’accent sudiste et l’humour douteux semblaient provoquer des maux de ventre, à en juger par les grimaces de certains. Ça faisait rire Nedra. Les jumeaux avaient cette indécence latente qui soulignait leurs politesses d’une impertinence que leurs interlocuteurs ne saisissaient pas toujours. Et outre, l’évocation de leurs propres problèmes familiaux (des cauchemars immoraux venus d’une époque depuis longtemps oubliée) avaient soulagé ses épaules d’un poids certain, car en définitive, il y avait pire que d’oublier les contraintes futiles du quotidien. On pouvait être maudit, ce que Nedra n’était pas, et ce simple fait suffisait à leur attirer sa sympathie. « Stop fussing. And stop eating your nails, it’s disgusting. » D’une tape sur les doigts, Nedra éloigna la main de Dafne de sa bouche. Elle lui jeta un regard noir avant de soupirer d’un air furibond. « How can they say so much shit ? Don’t tell me you agree with this extremists bullshit ?You’re overreacting.Sorry but that’s what it is. They’re talking ‘bout wizards like they’re nothing more than a disgusting species to wipe out. What a bunch of fucking nonsense. » Blessée, Nedra se tourna vers elle, les doigts serrés autour de sa coupe à demi-vide, les paroles suspendues à ses lèvres par l’intervention sèche de sa soeur. « And before you talk shit again, let me remind you that you dated a wizard for almost three years. Don’t tell me you forgot that.For what it’s brought me. » rétorqua-t-elle sombrement avant de noyer son dépit dans le champagne, et il s’en fallut de peu pour qu’elle s'étrangle dans sa mauvaise foi. Une pensée que parut partager sa cadette, qui laissa échapper un rire sans joie mais s’abstint de commenter. Cadell n’y était pour rien. Et il lui manquait tellement, encore maintenant, qu’il n’y avait pas un jour où elle ne regrettait pas les horreurs proférées un an plus tôt. Elles la hantaient aux moments les plus inopportuns, la tiraient parfois de ses nuits comme si la Nedra de ce jour là s’était tenue juste à côté d’elle, la bouche collée à son oreille, ses propres invectives lui explosant les tympans avec la force d’un hurlement.

(april 2020)« What did you just say ? » Il ne crie pas, mais c’est tout comme. Quelque chose se tasse au fond de ses tripes et elle craint, non, elle est certaine, qu’il est trop tard pour faire marche arrière. Il suffirait pourtant de s’excuser. Sorry, it’s not what I meant. Words went beyond my thoughts. Mais elle massacre plutôt ce qui pourrait encore être sauvé en hurlant à moitié, des larmes plein la voix (c’est qu’elle n’y croit plus, depuis longtemps). « Did you really believe that this was gonna work ? It’s not, Cadell ! It’s just painful, and grueling, because all I see when I look at you is the silly face of that motherfucking wizard who took my memories away. I can’t stand it anymore, and it’s not like we were gonna get married or something, do we ? It’s over and I think you know that it’s been falling apart for awhile now. » Elle ne sait pas comment il fait pour la regarder encore. Peut-être aurait-elle préféré qu’il ne le fasse pas. Il aurait été plus simple d’ignorer la déception qui submerge ses iris et éclipse tout le reste, mouche silencieusement l’éclat qui y brille d’ordinaire, et un instant plus tard, Cadell n’est plus là.


« Nedra ? » La voix de sa mère la ramena au Cricket Club et ce fut aussi agréable que de se faire tirer de son lit à 5h du matin. Avec un tact typiquement anglais, Romy introduisit les deux personnes qui l’accompagnaient. Elle avait passé son bras sous celui de la grande femme qui se tenait à sa droite, dont l’air sévère n’était nullement atténué par le sourire qui étirait ses lèvres maquillées de rouge — un rouge trop soutenu pour son âge, songea Nedra. Un corail léger aurait mieux convenu, allégé les traits anguleux que quelques rides discrètes parsemaient ça et là. « Do you remember Josephine ? It’s an old friend of mine. We spent some holidays with her and her son when you were a kid. » Josephine prit sa main dans les siennes, sèches et douces. « I do remember you. You were terrible when you were ten.And this is Benjamin. » Le grand type blond qui surplombait la table à la gauche de Romy lui sourit d’un air aimable, les mains enfoncées avec nonchalance dans les poches de son pantalon de costard, impeccable, du reste. Un habitué des salons et des réunions de ce genre à en juger par l’aisance avec laquelle il évoluait au milieu de ce ramassis de lèche-culs. Elle l’avait déjà remarqué, s’était vaguement demandée pourquoi sa tête lui revenait autant. « A pleasure. But we already know each other, right ?Apparently… I have to admit I’m not very good at remembering faces these days. » Sa mère palpitait d’auto-satisfaction et lorsqu’elle les laissa seuls à la table, entraînant Josephine derrière elle avec un air de conspiratrice, Nedra éprouva de manière physique l’étreinte du piège qui se refermait sur elle.

(summer 2023) Il s’avéra que Benjamin n’était pas seulement aimable ou agréable à regarder. Il était aussi à l’aise en société qu’il savait la critiquer avec une justesse piquante, moquant ces mêmes individus envers qui il se montrait si élégant le reste du temps. Plus grave encore, il avait endossé vis-à-vis d’elle le rôle que l’on attendait de lui avec une confiance qui la terrifiait. Car de confiance, Benjamin n’en manquait jamais. En leur cause commune, en leur relation (pouvait-on parler d’amour), en ce qu’il attendait de cette vie et qu’il saurait obtenir avec le flegme propre aux gens de son espèce, et quiconque gravitait dans son aura se laissait à son tour gagner par cette assurance puante. Les choses étaient simples et aucun problème ne semblait jamais vouloir surgir pour lui donner une bonne raison de le quitter si bien que Nedra, en dépit de ses scrupules, avait fini par adhérer avec trop de facilité à l’idéologie du mouvement puriste à laquelle Kaplan appartenait, avait renoncé à adopter le chat qu’elle voulait tant, et s’était entendue dire « oui » sans même hésiter lorsqu’il avait posé un genou à terre dans une scène digne des meilleurs soap-opera.
Et chaque jour que Dieu fit, sa mère se félicita d’avoir su le placer si judicieusement sur la route de la plus bornée de ses filles. « I knew Ben and you would fit very well together. »  Pour un peu, elle aurait demandé à être couronnée sur le champ pour son succès, mais le regard embué qu’elle coula en direction de son aînée, mal à l’aise dans sa somptueuse robe crème, parut lui suffir. « This is a mistake. This is a huge mistake.Everybody says that when they’re about to get married, » éluda vivement sa mère en enfonçant plus brusquement que nécessaire une épingle dans le chignon compliqué qui lui esquintait le cuir chevelu. Elle avait les mains moites. La sensation que son coeur avait doublé de volume, mais certainement pas pour les bonnes raisons. Il tapait si fort contre ses côtes qu’elle commença à se sentir mal : elle allait vomir d’un instant à l’autre, quand bien même n’avait-elle rien avalé depuis la veille. « Mom. I can’t. I can’t marry him, I swear this isn’t what my life was supposed to be like, it wasn’t supposed to be him, I— » Les serres de Romy s’enfoncèrent dans son bras lorsqu’elle la fit pivoter vers elle et le regard qu’elle planta dans le sien n’eut soudain plus rien d’affecté. « Whatever you’re thinking about right now, shut it down. » Elle se radoucit. Passa une main fébrile sur son épaule crispée. « This is nothing less than normal. You’re scared, but you’re gonna be alright. He’s the one for you, and you love him, right ? » Right.


v. the devil

(october 2026 - guy’s hospital) Un soleil moqueur brise la pénombre de la piaule surchauffée. Dans les couloirs, on entend les roulettes des chariots se mêler aux éclats de voix qui ricochent dans les couloirs aseptisés; la chambre de Mme Vilmer s’il vous plaît, est-ce que je peux parler au médecin, sorry visits are only allowed in the afternoon, come back later sir. « Don’t you want me to open up a little ? It’s so hot in here... » Un peu de lumière te ferait du bien. Il fait jour dehors, tu sais. Le monde ne s’est pas encore arrêté de tourner — en a-t-elle encore quelque chose à foutre. Benjamin est parti la veille en claquant la porte, et le regard interdit qu’il lui a jeté par dessus le berceau lui pèse encore sur l’estomac comme un repas trop copieux. Un silence incroyablement lourd s’était abattu alors qu’ils contemplaient le bébé, dans une reproduction grotesque de la Nativité. De ces silences qui veulent tout dire, alors que le poupon les observait en retour de ses grands yeux sombres, l’air surpris, minuscule dans cette turbulette immaculée qui soulignait davantage les nuances dorées de sa peau. « No. » Elle a froid. Ramène un bout de drap sous son menton, le regard résolument fixé sur le vide situé au delà du mur, dont la peinture rose bonbon suffit à elle seule à expliciter sa migraine carabinée. À sa droite, sa mère soupire, masque difficilement l’agacement que lui inspire le comportement de sa fille, bien loin de l’extase qu’est censée susciter la naissance de son premier né aux yeux de Romy. Elle cajole le bambin dont les bruits de succion s’accentuent à mesure qu’il tète ses doigts avec appétit. « God he’s lovely. What are you going to call him ? Tell me baby boy, what’s your name ? » Elle sent que quelque chose aurait dû s’agiter, affoler le myocarde à la simple idée qu’elle n’a toujours pas de prénom, de la panique, peut-être, en repensant à la liste qui gît sur la commode de l’entrée et à laquelle ni elle ni Ben ne s’est intéressé depuis des semaines. Mais le trou béant qui occupe l’espace entre ses côtes demeure inexorablement mort, et immobile. Il n’y a rien d’autre à dire que : « I don’t care. » avec une sincérité qui la terrifie. L’expression de sa mère n’aurait pas été différente si Nedra l’avait insultée. « Don’t be silly. He’s your son, how can you not care ?I just don’t alright ?I thought you and Ben had…Mom. Ben’s left and I wouldn’t bet a penny on his return, and I’m sure you can guess why. » Ça crève les yeux, putain. « Now leave me alone and call a nurse- » une grimace tord ses lippes alors qu’elle ramène ses jambes contre elle, les mains crispées sur son bas-ventre. « -hurts like a bitch. »


vi. the chariot

(march 2029) Laura était française. Débarquée à Londres deux ans plus tôt en tant qu’au-pair, elle n’en avait pas cru sa chance lorsqu’elle était arrivée chez les Kaplan, subjuguée par le luxe discret qui suintait de chaque recoin de la bâtisse, située en plein coeur de Knightsbridge. Les moulures au plafond, le silence profond qui remplissait les pièces, l’odeur savoureuse du jasmin qui imprégnait l’atmosphère, le home cinéma. Fuck, elle avait même une salle de bain privative et un écran au plafond de sa chambre, sans même parler du fait qu’elle était payée rubis sur l’ongle pour s’occuper d’un bambin qui n’exigeait rien d’autre d’elle que son attention, qu’elle lui accordait d’ailleurs bien volontiers. Nedra était capricieuse comme une enfant, oubliait sans cesse des choses qu’elle prenait pourtant soin de lui rappeler tous les jours, et elle cuisinait comme un pied (la dernière fois, elle avait réussi à brûler des pâtes, Laura ne comprenait toujours pas comment). Et bien qu’elle fût un peu fatigante à la longue (parfois il lui semblait qu’elle n’avait pas été embauchée pour s’occuper d’un bébé mais bien de deux), son mari parvenait à lui seul à relever le niveau les rares moments où il était présent. Il hantait ses rêves. Lui arrachait des rires conquis à la moindre remarque, quand bien-même fut-elle tout sauf drôle. Des manières affables, un style impeccable dans le genre busy boss, qui s’accordait à merveille avec la coupe savamment désordonnée qui lui donnait cet air d’adolescent rebelle. Et si elle avait bien remarqué les différences criantes entre lui et son fils, elle n’avait rien dit, parce qu’elle leur devait bien ça, et que les sous-entendus vachards des journaux people semaient déjà une discorde véhémente au sein du couple.
Sa vie était parfaite.
Parfaite, jusqu’à janvier dernier, où elle avait proprement viré au cauchemar. On lui avait ri au nez lorsqu’elle avait exigé de rentrer chez elle après le coup d’Etat. La Milice sillonnait les rues. Les communications étaient coupées, elle n’avait plus de nouvelles de personne. Benjamin ne vivait même plus avec Nedra (elle l’avait vue pleurer au dessus d’une pensine plus d’une fois et supposé, à tort, qu’elle ressortait d’un quelconque souvenir de son mariage), qu’elle retrouvait parfois sur le canapé du salon dans un état de semi-coma, des boîtes de pilules et des flacons vides s’accumulant sur la table basse (elle lui avait pourtant dit de ne pas laisser traîner ses médocs, à cause de Vinnie, mais l’idiote n’entendait rien). Elle ne sortait plus que pour faire les courses tant elle avait peur de se faire arrêter en dépit du certificat que lui avait laissé Ben. Seule l’affection de Vinnie parvenait encore à la tirer de son apathie douloureuse (elle ne se reconnaissait plus). Vinnie qui, du haut de ses deux ans, hurlait à s’en casser la voix, sa tignasse brune toute décoiffée, suspendu au bras de sa mère qui criait presque aussi fort et semblait, elle aussi, sur le point de fondre en larmes. L’un et l’autre tiraient d’un bout à l’autre du téléphone que Nedra essayait de récupérer après le lui avoir fichu dans les mains pendant deux heures, histoire d’avoir la paix, le temps de se préparer pour sortir. Laura avait horreur de la voir faire ça ; elle avait pourtant essayé de lui expliquer un nombre incalculable de fois que ce n’était pas bon (elle avait lu un tas de choses sur l’effet néfaste des écrans sur les cerveaux en développement). Rien à faire. « Jesus Christ ! Drop it, I’m already late. » Comme si le bambin était capable d’entendre quoi que ce soit d’autre qu’une colère injustifiée, qu’un rejet incompréhensible. Ses pleurs s’intensifièrent lorsqu’elle finit par le poser sur ses genoux pour arracher d’un geste brusque le smartphone de ses petites mains potelées. « Not fair ! » Si les mots noyés de larmes étaient tout juste compréhensibles, ils eurent toutefois un effet curieux sur sa mère. Ils remuèrent le lointain souvenir d’une chaude soirée à Los Angeles en compagnie de sa soeur et de ses parents. Les embruns qui projetaient des perles d’eau salée lorsqu’elles s’amusaient à sauter dans les vagues, et qui laissaient leurs peaux bronzées lardées de traces de sel d’un blanc nacré ; l’odeur particulière de la maison qu’ils habitaient ; la foule qui noircissait les plages l’été ; l’ambiance fiévreuse des plateaux de tournage où son père l’emmenait parfois ; le châle rouge et soyeux dont sa mère les enveloppait pour les endormir, leur assurant que l’étoffe était pourvue de pouvoirs magiques qui éloigneraient tous leurs cauchemars. Où était passé ce châle ? Surprise, car nombreux étaient les épisodes de sa vie qui s’étaient perdus en route ces dernières années, Nedra s’interrompit et posa sur son fils un regard étrange, la sensation d’avoir été crochetée au commencement de sa vie se mêlant à la peine, à laquelle elle ne trouva —ni ne chercha— d’explication. D’une main, en silence, elle repoussa les mèches sombres qui collaient à son front et le regarda comme s’il s’était agi de la première fois. « I know, honey. » Le silence les gagnèrent. Vinnie cessa de pleurer, secoué de hoquets, ses yeux ourlés de cils sombres fixés dans le vide. Laura laissa tomber ce qu’elle était en train de faire et, saisie d’une curieuse tendresse pour Nedra, quitta la pièce en silence. La voix de son employeuse la retint alors qu’elle refermait doucement la porte coulissante. « Laura. Will you take care of him ? Send me a text, maybe ? » Elle haussa un sourcil surpris ; et que faisait-elle le reste du temps ? Le cynisme se dissolva dans l’inédit de la question. Nedra ne s’occupait jamais, d’ordinaire, d’avoir des nouvelles du petit lors de ses déplacements. Maintenant qu’elle y repensait, elle lui semblait bizarre, ces derniers jours ; différente, inquiète, peut-être, pour des raisons qui lui échappaient. Elle acquiesça. « Of course I will. » L’autre adressa un sourire au tapis et posa sa joue au sommet de la petite tête brune. « Good. »

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words remain.

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